Toute victime de violences conjugales doit être protégée afin de préserver son état de santé physique et psychique, voire, le cas échéant, celui de ses enfants. Il appartient à la Justice d’assurer leur sécurité, de prévenir d’autres atteintes à venir et de sanctionner l’auteur des faits.
Un arsenal législatif existe aux fins de prévenir et réprimer les violences conjugales, et de protéger la personne qui en est victime. Les dispositions civiles (I) et pénales (II) applicables font intervenir plusieurs magistrats. Parallèlement à l’intervention de la Justice, une aide financière d’urgence a récemment été créée au profit des victimes (III).
Il est conseillé d’être assisté par un avocat au cours de ces procédures.
I – Volet civil : la sécurité de la victime de violences conjugales
Depuis 2010, la loi permet à toute personne qui allègue être victime de violences de la part de son concubin / partenaire / conjoint de requérir du Juge aux affaires familiales d’émettre à l’encontre de l’intéressé(e) une ou plusieurs interdictions et obligations destinées à protéger provisoirement et dans l’urgence le ou la requérante, à l’occasion de la délivrance d’une ordonnance de protection. La loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille a étendu le champ d’application de cette procédure à l’hypothèse où le couple ou l’ancien couple ne cohabite pas ou n’a jamais cohabité. En outre, la partie demanderesse n’est pas nécessairement la victime directe des violences : l’ordonnance de protection peut également être ordonnée lorsque ces violences mettent en danger un ou plusieurs mineurs.
La demande d’ordonnance de protection prend la forme d’une requête. La partie demanderesse peut solliciter du Juge aux affaires familiales l’autorisation de dissimuler l’adresse de son domicile sur la requête.
Dans l’immense majorité des cas, la demande émane de la personne en danger, au besoin assistée d’un avocat. Elle peut également émaner du ministère public avec l’accord de la victime. En conséquence, il est essentiel que la personne en danger assimile sa position de victime aux fins d’enclencher cette procédure. Pour ce faire, l’aide des proches, du corps médical (psychologue, psychiatre) mais aussi des auxiliaires de justice (avocat, associations spécialisées) s’avère précieuse.
L’assistance d’un avocat à ce stade est recommandée afin de constituer un dossier suffisamment solide pour démontrer la nécessité de la mesure et son caractère urgent.
En effet, la délivrance de l’ordonnance ne pourra s’envisager que si le Juge estime qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime et / ou un ou plusieurs enfants sont exposés. Cette décision dépend du pouvoir souverain d’appréciation du Juge aux affaires familiales, mais cette appréciation est en définitive basée sur les éléments produits devant lui. Il est donc crucial que la requête soit la plus circonstanciée et précise possible.
Afin de solidifier la procédure, il est fortement recommandé antérieurement de déposer une plainte ou a minima une main courante.
L’assistance d’un avocat lors de l’audience qui se tient devant le Juge aux affaires familiales n’est pas obligatoire. Elle est toutefois fortement conseillée pour aider la victime à fournir un compte-rendu précis et circonstancié des faits et garantir le respect de ses droits. L’auteur des violences est susceptible d’être présent à l’audience pour y être entendu. Cependant, les auditions des parties peuvent se tenir séparément à la demande des parties.
Si la demande d’ordonnance de protection est accueillie, l’ordonnance produit ses effets immédiatement, pour une durée maximum de six mois.
À cette occasion et afin d’organiser au plus vite les conséquences de la séparation, le Juge peut statuer sur la résidence séparée des époux ou le logement commun de partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou de concubins.
S’il accorde la protection demandée, le Juge aux affaires familiales peut ordonner une ou plusieurs obligations ou interdictions restrictives ou privatives de droits à l’encontre du défendeur, notamment :
l’interdiction de recevoir, de rencontrer ou d’entrer de quelque façon que ce soit en relation avec la victime. Cette dernière peut requérir du procureur de la République l’attribution d’un dispositif de téléprotection (dit « téléphone grand danger ») lui permettant d’alerter les autorités en cas de besoin, pendant une durée (renouvelable) de six mois.
l’interdiction de se rendre dans certains lieux spécifiques dans lesquels se trouve de façon habituelle la victime ;
l’obligation de porter un dispositif électronique mobile anti-rapprochement (dit « bracelet anti-rapprochement ») intégrant un émetteur GPS. Ce dispositif permet à la victime, qui porte le même émetteur, de signaler à tout moment à l’autorité judiciaire le non-respect de la distance fixée par le Juge. Toutefois, ce dispositif doit être accepté par les deux parties.
l’interdiction de détenir ou porter une arme.
Le Juge peut également proposer au défendeur :
une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ;
un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes.
En cas de refus de sa part, le Juge en avise immédiatement le procureur de la République.
Si des enfants encore mineurs sont issus de l’union du couple, le Juge peut réduire les droits parentaux de l’auteur des violences voire lui retirer l’exercice de l’autorité parentale.
II – Volet pénal : la répression de l’auteur de violences conjugales
Les violences volontaires désignent tout acte attentatoire à l’intégrité physique ou psychique d’une personne. Un comportement peut être qualifié de violent eu égard à son degré d’intensité, à son impact sur la victime ou à l’absence de consentement de cette dernière. Dans le contexte de violences survenant au sein du couple, celles-ci peuvent notamment prendre la forme de violences physiques, psychologiques, verbales et / ou sexuelles.
Les peines encourues en matière de violences volontaires sont aggravées lorsqu’elles sont commises à l’encontre de la compagne / du compagnon de l’auteur des faits, même dans le cas où les intéressés ne cohabitent pas. Les peines prévues sont également aggravées dans le cas où les intéressés étaient déjà séparés mais que les violences ont été commises en raison des relations ayant existé entre eux, ou que les violences sont commises en présence d’un mineur.
La victime qui souhaite porter plainte au commissariat ou dans une brigade de gendarmerie peut être accompagnée par toute personne de son choix, y compris un avocat. Pour plus de discrétion, cette plainte peut également être déposée par un moyen de télécommunication audiovisuelle assurant la confidentialité de la transmission.
Un examen médical peut être demandé par l’autorité judiciaire pour constater l’état de santé physique ou psychologique de la victime et décrire les éventuelles lésions subies.
Un certain nombre d’interdictions restrictives ou privatives de droits et d’obligations judiciaires peuvent être ordonnées à l’encontre d’un individu suspecté ou reconnu coupable de violences conjugales.
Limitées dans la durée, elles peuvent notamment consister en :
l’interdiction de rencontrer, recevoir ou entrer en relation avec la victime ;
l’interdiction de s’approcher de la victime ;
l’interdiction de paraître au domicile de la victime ;
Pour assurer le respect de cette dernière interdiction, le procureur de la République peut ordonner la mise en place du dispositif électronique mobile anti-rapprochement susmentionné. La pose du bracelet ne peut être effectuée sans le consentement de l’intéressé mais le fait de la refuser peut justifier le placement de l’auteur des violences en détention.
Par ailleurs, le procureur de la République peut décider d’attribuer un téléphone grand danger à la victime de violences conjugales, avec son accord, si l’auteur des violences fait l’objet d’une interdiction judiciaire d’entrer en contact avec elle ou s’il est en fuite, qu’il n’a pas encore pu être interpellé ou que l’interdiction judiciaire d’entrer en contact avec la victime n’a pas encore été prononcée.
III – Une aide financière d’urgence pour les victimes de violences conjugales
La loi n° 2023-140 du 28 février 2023 a créé une aide financière d’urgence au profit des victimes de violences conjugales.
Cette aide est versée en une fois par les Caisses d’allocations familiales.
Elle peut prendre la forme soit d’un prêt sans intérêt, soit d’une aide non remboursable, en fonction de la situation financière et sociale de la personne et en tenant compte, le cas échéant, de la présence d’enfants à charge. La personne déclarée coupable de violences conjugales par une juridiction pénale pourra être condamnée à rembourser le prêt alloué à la victime en application du nouvel article 222-44-1 du Code pénal.
Le Décret n° 2023-1088 du 24 novembre 2023 modifiant le Code de l’action sociale et des familles précise les conditions d’ouverture du droit à l’aide d’urgence, son montant et ses modalités d’attribution. L’aide ne peut être attribuée qu’une fois par période de douze mois à compter de la date de la décision d’attribution.
Pour bénéficier de cette aide, le demandeur ou la demanderesse doit attester de l’existence de violences conjugales en fournissant selon les cas une copie de l’ordonnance de protection délivrée par le Juge aux affaires familiales, de leur plainte ou du signalement adressé au procureur de la République. Pour la mise en œuvre de cette procédure, ces pièces sont valables un an.
Lorsque des violences au sein d’un couple sont alléguées, ou en cas de conflit conjugal prégnant, l’assistance d’un avocat est conseillée pour s’extraire de cette situation. En sus de régler les conséquences financières ou familiales de la séparation, un avocat peut utilement défendre la victime de violences conjugales afin d’assurer sa sécurité ou celle de ses enfants.
Forte de son expérience en la matière, Maître HIBON saura utilement vous assister dans tout litige qui vous oppose à votre compagnon / compagne actuel(lle) ou passé(e).
Maître HIBON offre son assistance aux personnes éligibles à l’aide juridictionnelle partielle ou totale, étant précisé que cette aide juridictionnelle est de droit pour celles présentant des blessures particulièrement graves ou victimes de violences sexuelles.
Sources :
Art. 515-9 et s. du Code civil.
Art. 1136-3 et s. du Code de procédure civile.
Art. 41-3-1 du Code pénal.
Art. 15-3 et s. du Code de procédure pénale.
Article 138 du Code de procédure pénale ; art. 138-3 du Code de procédure pénale ; art. D1-2 à D1-12 du Code de procédure pénale.
Art. R. 434-14 du Code de la sécurité intérieure.
Art. L 214-8 à L 214-17 et art. D 214-11 à D 214-25 du Code de l’action sociale et des familles.
Contacts utiles (Calvados) :
ACJM (Association d’aide aux victimes)
secretariat.calvados@acjm.info
Téléphone : 02 31 35 67 10
Centre d’information sur les droits des femmes
et des familles du Calvados - CIDFF 14
Résidence Saint Ursin
10 rue Roger Aini
14100 Lisieux
Site internet du CIDFF 14
Téléphone : 02 31 62 32 17
Numéros SOS :
Viols Femmes Informations : 0 800 05 95 95
Femme Violence Conjugale : 39 19
Violences Familiales : 01 44 73 01 27